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Jean-François FLAMAND


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Vers la terre de Caïn
Notre navire le Nordik Express, cargo mixte porte-conteneurs, trapu, fonctionnel, assure au départ de Rimouski la desserte et l’approvisionnement des villages isolés de la rive nord du Saint Laurent de Sept Iles à Blanc Sablon, à la frontière provincial du Labrador.
En ce jour beau et légèrement brumeux il faisait route de son étrave peinte de blanc dans des eaux immenses et grises et dans ce vide de l’esprit que confère le voyage, nous fixions en guise de repaire son triangle avant et son mat d’antenne, du pont supérieur où nous nous tenions ordinairement pour guetter les baleines.
Au fil du temps nous quittions un embarcadère de bout du monde pour aborder à un autre à toute heure du jour ou de la nuit et alors, parfois sous la lumière crue des projecteurs, dans le bruit et la fureur des grues, des camions et des engins, le navire déchargeait sa cargaison. Nous en profitions pour prendre pied à terre.
La vie sur un bateau est normalement réglée de manière quasi monastique par l’horaire de la salle à manger du bord ; par chance, un malentendu au bureau de la Compagnie nous avait exclus de ce cérémonial. Nous mangions donc quand la faim venait et les rythmes de sommeil et de veille obéissaient au hasard de la navigation.
Celle-ci aurait pu durer jusqu’à la consommation des temps si après trois jours et trois nuits nous n’étions parvenus à la destination finale du Nordik Express.
Le lendemain un grand bateau traversier, vétuste et très convenable à une catastrophe maritime, nous déposa à Sainte Barbe de Terre Neuve ; pas très loin de « l’anse aux Meadows » où le Viking Leif Erikson aborda vers l’an mille.
JF Flamand août 2002

Tous droits réservés, Jean-Francois Flamand, janvier 2005.